Le Sud-Ouest à vélo
J'avais envie de traverser le Sud-Ouest, de redécouvrir mon pays natal de long en large, de déborder jusqu'aux portes de la Méditerranée, et me récompenser par un cassoulet gastronomique ... je ne suis pas allé jusqu'au bout, le cassoulet attendra ...
Jour 1 Le Bordelais
Mon itinéraire est valloné, je l'ai optimisé au mieux pour éviter un dénivelé excessif ou inutile. Je pars de Bordeaux après un voyage express en TGV depuis Paris.
Par chance les TGV Atlantique acceptent les vélos sur réservation, par contre l'emplacement est squatté systématiquement par des bagages, il faudra toute l'énergie du Contrôleur pour pouvoir y installer les deux vélos du jour.
Bordeaux, 3h de l'après-midi, un beau soleil, 60km à faire sur la véloroute des deux mers, à priori une simple formalité ...
Direction la Norvège
Dès les quais de Garonne, la piste est balisée, direction "La Norvège" ... j'adore, cela me fait rêver ! cela a l'air si simple !
Après avoir longé la Garonne, voici la belle piste "Roger Labépie", une ancienne voie de chemin de fer qui mène jusqu'à Sauveterre-de-Guyenne à 45km de là, avec un superbe revêtement d'enrobé lisse.
Il y a un peu de dénivelé, mais il est très doux, très régulier, la voie est boisée bien à l'ombre ... elle grimpe doucement, longtemps.Je reste philosophe, petit à petit je me rapproche du but, un petit camping perdu dans la campagne dans lequel j'ai réservé une tente toute montée. Je ne voudrais pas abuser de l'hospitalité de mes hôtes en arrivant trop tard, alors je téléphone "j'arriverai vers les 19-19h30 ...".
C'était une estimation optimiste pour une arrivée effective à 20h15 ... cette première étape était très belle, mais le cycliste ne fut pas à la hauteur !!
En Cinémascope
La tente s'appelle "Out of Africa" en référence au célèbre film, avec un matelas très confortable. À proximité un abri en dur avec chaises et tables, des sanitaires parfaits, je suis tout seul dans ce petit camping.
La nuit tombe, le ciel est constellé d'étoiles, au loin une chouette hulule ... c'est rare de se sentir aussi bien, autant en symbiose avec la Nature et le Cosmos. Je m'endors dans un silence apaisant.
Au petit matin la fraîcheur se fait plus incisive, je rajoute une couverture et je m'enfonce encore plus sous la couette douillette ... ça a du bon le confort ...
Jour 2 Les Landes
Bon, il faut que je me lève, une nouvelle étape m'attend, mais vraiment, ici c'était "trop bien" !! Avant de partir, chauffé par les rayons du soleil levant, je profite d'un petit déjeuner copieux.
Je commence par de petites routes vallonnées au milieu des vignes du Bordelais, qui me font grimper jusqu'au village de St Foy-la-Longue, de là le paysage est grandiose !
Interdit d'interdire
Au village de Caudrot, la rue principale est en sens interdit, large comme une autoroute, je m'y engage confiant, il n'y a personne ... au loin j'aperçois la postière, des lettres dans les mains, immobile, et plus j'approche, plus elle me fixe et me foudroie du regard, elle m'apostrophe "C'EST UN SENS INTERDIT, VOUS N'AVEZ PAS LE DROIT DE ROULER ICI !!!" ... puis en voyant mon vélo "AH D'ACCORD, ET EN PLUS ON NE VOUS VOIT PAS !" ... que répondre ? je dis un "Bonjour ..." et je continue mon chemin. Je n'ai rien à dire, je suis en tord, mais j'aurais aussi mille arguments à lui rétorquer sur les bienfaits du vélo et l'erreur de les interdire ici, d'ailleurs Caudrot serait-elle la dernière ville de France à ne pas autoriser les vélos dans les sens interdits ? (*) De plus son préjugé sur mon type de vélo l'a discréditée, son agressivité l'a trahie ...
(*) les villes qui passent à 30km/h ont d'office tous les sens interdits en double sens cyclables.
Ici je suis un étranger, sur un vélo bizarre, je ne suis que de passage, un nomade, et donc une cible idéale à la vindicte des gens ... Je ne suis pas habitué à ces réactions belliqueuses, d'habitude c'est l'inverse, les gens m'abordent facilement, je suscite la curiosité pour mon vélo et l'admiration pour mon voyage. Tant pis, c'est la vie, l'humain est déconcertant, il faut apprendre à vivre en bonne intelligence avec tout le monde ... mais j'ai du mal à accepter cette remontrance, je la digère mal et j'ai tendance à la ruminer toute la matinée (!).
Je passe un pont ancien, structure en fer à la Eiffel, au dessus d'une rivière ... pour m'apercevoir un peu plus loin que c'était la Garonne, surpris du peu d'eau en cette fin d'été.
Le camion fou
J'approche de la forêt des Landes, les routes s'élargissent parfois avec un bel espace sur le coté, plus rassurant pour le cycliste que je suis. Alors que je m'extasie sur cet aménagement sympathique, un camion me double à 50 cm, à pleine vitesse ... non seulement il ne s'est pas déporté ni n'a ralenti, mais au contraire, il s'est rabattu pour mieux croiser un véhicule arrivant en face, m'ignorant avec mépris, à moins que ce soit volontaire.
Les cyclistes sont malheureusement parfois victimes d'intimidations et même d'agressions réelles, renversés par des automobilistes agacés d'avoir perdu quelques secondes ... Si les cyclistes bénéficiaient d'aménagements sécurisés comme aux Pays-Bas, ce genre de mésaventure n'arriverait pas.
Je m'interroge sur l'origine de cette agressivité, qui est palpable sur les réseaux sociaux. Le vélo fait-il peur ? les gens ont-il peur qu'un jour ils devront enfourcher un vélo, perdre le confort de leur limousine ? Peur de retourner dehors et subir les caprices de la météo ? ... Le vélo et les cyclistes qui montrent la voie pour un monde meilleur, seraient-ils pour les automobilistes un monde bien pire ... ? Et pourtant, le vélo ne coûte presque rien, il est source de santé, de liberté, aucune pollution, sans danger pour les autres... et tant d'autres bienfaits pour soi et la société !
Faux plats
La forêt des Landes exhalent des senteurs de résine et le chant des cigales résonne sous les frondaisons des pins. Je roule sous un beau soleil, le ciel est pur, l'air est presque frais. La route est plate, du moins elle semble plate, parfois je peine à 16km/h, parfois je file à 25km/h sans que soit perceptible à l'oeil une quelconque pente.
Les mouches du coche
Il y a de temps en temps une petite rivière à traverser, la route descend, enjambe la rivière puis remonte de l'autre coté, m'obligeant à mouliner et rouler à petite vitesse, et à chaque fois, je me retrouve accompagné d'un nuage de mouches tout autour de la tête. Aucune ne se pose, aucune ne me touche, elles filent avec moi à 10 km/h ... cela m'amuse, et surtout m'intrigue. Mais qu'est-ce qui les attire ? pourquoi donc ? à quoi sert cette danse autour de ma tête ?
L'infini
Les routes des Landes s'étirent, s'allongent dans des lignes droites sans fin, bordées de forêts de pins, dans une monotonie languissante qui a du charme.Je m'imagine dans un vaisseau spatial en route vers la galaxie voisine que j'atteindrai dans 100 millions d'années.
Je roule vers l'infini, le bout de la route est là-bas, loin, très loin, très très loin. Pour arriver à l'infini il me faudrait vivre l'éternité ... pas sûr que j'y arrive un jour.
Heureusement l'infini n'est qu'une imagination de l'esprit, et l'étape du jour a bien une fin, l'entrée du camping.
Anecdote
La petite histoire du jour est ce couple extérieur au camping, en voiture, à la recherche d'un restaurant. Ils entrent dans le camping en suivant un véhicule, se garent, cherchent désespérément quelqu'un ... mais il est 20h et le gérant a déjà fermé boutique. Le couple repart mais la barrière ne s'ouvre pas, il faut un badge, au téléphone personne ne répond ... ils vont quémander au camping-car voisin le service du badge, la personne arrive, ouvre la barrière, j'interviens alors pour signaler la règle qui veut que l'on a droit qu'à 1 sortie, suivie de 1 entrée, et donc que notre camping-car ne va plus pouvoir sortir. La conversation durant, la barrière se baisse ... stupeur ... le couple n'était toujours pas ressorti, et nos hollandais sont aussi coincés !! Impossible de réactiver le badge en simulant une entrée, il y a un détecteur magnétique pour le véhicule !! Je réussis à débloquer la situation en ramenant un panneau publicitaire métallique permettant de simuler la voiture, un coup pour entrer, un coup pour sortir enfin, puis à nouveau un coup coté entrée pour réactiver le badge pour la future sortie du camping-car ... ouf !!!
Jour 3 L'Armagnac
Deux jours que je suis sur les routes, j'ai toujours la forme, mais ces débuts étaient faciles, j'aborde la Gascogne, un pays plus valloné, j'ai donc réduit les distances à parcourir.
La bastide
La première étape du jour est le village de Labastide d'Armagnac, un petit village qui à su garder son visage d'autrefois, avec de belles maisons à colombages et des passages couverts sous les arcades.
J'erre dans les petites rues décorées avec quelques beaux vélos anciens. J'en profite pour faire mes courses pour le casse-croûte du midi.
Je m'installe au café pour ma première pause de la journée, nous sommes en septembre, les estivants ont déserté les lieux, ne restent que les locaux et quelques retraités ... comme moi (!).
Sur la route, une moto me double, c'est à peine si je l'ai entendue arriver. Le motard roule à une vitesse raisonnable et son engin est un exemple de sobriété sonore ! D'ordinaire, les fans de moto roulent à des vitesses supersoniques dans un vacarme que seul les sourds peuvent supporter ...Jour 4 La Lomagne
Ici il y a une vraie piste cyclable qui va jusqu'à Condom à 16km de là. Je l'attrape à la sortie de la ville, c'est une ancienne voie ferrée, avec un magnifique revêtement en enrobé lisse, très roulant, et en plus le profil est descendant jusqu'à Condom ! C'est la fête !!
Bonjour Jacques,
RépondreSupprimerVous faites partie de ceux dont les vidéos m'ont convaincu de passer au vélo couché.
Je pratique depuis environ 6 mois, avec une expérience de 3 jours de cyclocamping, que je prévois de renouveler le printemps prochain pour une durée de 1 mois.
A ce propos, pouvez-vous me donner les références de votre béquille ? J'en ai trouvé plusieurs modèles sur les sites de vente, mais je crains qu'elles butent sur la sacoche située sous le siège. La charge à reprendre est d'au moins 50 kg.
Bien cordialement,
Michel.
Bonjour, merci pour message et très heureux d'avoir participer(de loin) à votre choix de passer au vélo-couché !
SupprimerPour ce qui est de la béquille, c'est une ESGE/PLETSCHER, elle était installée d'origine. Il semble que ce soit une marque d'accessoire et plusieurs types de béquille existent sous cette marque, il vous faudra trouver la bonne. A priori la béquille se plie à l'horizontale et ne gêne pas.
Vous parlez de 50kg, mais la béquille ne supporte pas la totalité du poids. Avec les 2 roues, c'est un 3eme point d'appui qui supportera un poids proportionnel à l'inclinaison ... Dans tous les cas c'est bien pratique et cela permet de s'arrêter n'importe où sans souci, surtout avec un vélo chargé.
Bonnes randonnées ! Jacques